Samedi 20 décembre 2025

Vraie et fausse humilité

La prière de ce jour :

Aide-nous, Seigneur, à devenir assez humble pour faire comme la Vierge Marie ta volonté.

Si vous voulez pratiquer véritablement cette vertu, ne vous contentez pas de crier à l’humilité depuis le matin jusqu’au soir : tout le monde se fait un mérite de parler continuellement de l’humilité, et presque personne n’a cette vertu. La véritable humilité ne consiste pas dans l’extérieur de nos actions, et dans le soin que nous aurons d’embrasser à l’extérieur ce qui est humble, et de paraître aux yeux des autres dans une posture et une action basse et humiliée, bien que cela puisse être et soit souvent un effet de l’humilité véritable, qui est une connaissance et une conviction intime et intérieure, par laquelle on reconnaît paisiblement, doucement et amoureusement devant Dieu son néant, sa misère, sa pauvreté, son incapacité, sa nullité et l’horreur du péché dont on est plein.

François Libermann, Lettre du 30 septembre 1837

Je sais bien qu’il est très pénible de se voir incapable de faire quoi que ce soit pour l’amour de Dieu, de ne se sentir bon à rien, sinon à s’amuser et à s’enfoncer de plus en plus dans l’amour des créatures ; mais il ne faut pas pour cela se troubler ; au contraire, cela doit être pour nous un grand sujet de joie et d’amour envers Dieu. Nous devons nous réjouir en voyant que, de nous-mêmes, nous ne pouvons rien, et que nous sommes dans une dépendance continuelle de Dieu ; car, c’est là ce qui nous détache totalement de nous-mêmes, qui ne sommes que corruption et pourriture, et ce qui nous unit de plus en plus à Dieu, qui est notre force, notre soutien, notre amour et notre tout. Voilà la source de l’inconcevable humilité des saints, ainsi que leur amour plus inconcevable encore. Les plus grands saints ont vu combien ils étaient pauvres et misérables, et combien ils avaient un besoin extrême de Dieu ; et alors ils ont mis en lui tout leur amour et toutes leurs espérances.

Idem, Lettre du 10 avril 1836

Le comble de l’humilité sera donc de ne même plus chercher à être humble :

Toutes les fois que vous sentez cette peine de vos misères et de vos faiblesses, regardez-la dès le commencement comme une tentation, élevez votre âme à Dieu, humiliez-vous devant lui et acceptez votre pauvreté. Servez-vous de cette peine-même pour aller à Dieu et vous unir à lui, et ne vous inquiétez pas si cette peine vous reste, regardez-la comme une croix qu’il vous faut porter avec amour. Si vous faites ainsi, j’espère que, par la miséricorde de Dieu, elle vous sera d’une très grande utilité pour votre avancement spirituel. Confiez-vous pleinement entre les mains de Dieu. Nous pouvons et nous devons compter sur sa miséricorde, qui est infiniment supérieure à notre malice, quoique celle-ci soit bien grande.

Idem, Lettre du 7 septembre 1836

L´Auteur :

Libermann (Vénérable François, 1802-1852)

Jacob Libermann était le cinquième des neuf enfants du rabbin de Salerne, où il naquit en 1802. À la suite de son frère aîné, il est baptisé à 24 ans sous le nom de François, et s’oriente immédiatement vers le sacerdoce, mais sa santé précaire retardera son ordination jusqu'en 1841. Il n’attendra pas cette date pour être l’éducateur et le directeur spirituel de ses condisciples du séminaire Saint-Sulpice à Paris, puis chez les eudistes de Rennes.

Très tôt, partageant le souci missionnaire de son époque d’expansion coloniale, il jette avec quelques confrères les fondations d’une œuvre d’évangélisation des noirs d’Afrique, la société du Saint-Cœur de Marie, qui fusionnera en 1848 avec la congrégation du Saint-Esprit. Toujours tributaire de sa mauvaise santé, le Père Libermann mourra prématurément en 1852.

Malgré les difficultés de tous ordres qui auront entravé son existence trop courte, Libermann aura été l’un des reconstructeurs de la formation sacerdotale française après la fracture de la Révolution, et l’un des maîtres spirituels du clergé de sa génération, dans la tradition de l’École française. L’audace de ses projets missionnaires en fait également l’un des prophètes de l’action pastorale moderne.

Il nous reste du Père Libermann un volumineux commentaire de l’Évangile de saint Jean, divers écrits spirituels et missionnaires, et surtout une importante correspondance.