Mardi 21 octobre 2025

Saint Mauront
Évêque de Marseille (+ 782) 
 

Dieu seul rend heureux

Si les réalités corporelles te plaisent, c’est Dieu que tu en loueras, c’est vers leur créateur que tu retourneras l’amour que tu leur portes, afin de ne pas lui déplaire dans ces choses qui te plaisent. Si les réalités spirituelles te plaisent, aime-les en Dieu, car elles aussi sont changeantes, et c’est en étant placées en lui qu’elles trouvent leur stabilité ; autrement, elles passeraient et périraient. Que ce soit donc en lui que tu les aimes ; prends avec toi toutes celles que tu peux, porte-les à lui et dis-leur : « C’est lui qu’il nous faut aimer, lui qui a créé toutes ces choses et qui ne s’en éloigne pas. Il ne les a pas créées pour les abandonner, mais elles qui sont de lui, sont en lui. »
Où allez-vous par ces rudes sentiers ? Où allez-vous ? Le bien que vous aimez vient de lui, mais ce n’est que rapporté à lui qu’il est bon et doux. Hors de lui, il deviendra justement amer, car il n’est pas juste d’aimer une chose en ayant délaissé celui dont elle provient. Pourquoi marchez-vous encore et encore dans des voies difficiles et laborieuses ? Le repos n’est pas là où vous le cherchez. Cherchez ce que vous cherchez, mais il n’est pas là où vous le cherchez : vous cherchez la vie heureuse dans la région de la mort, et elle n’est pas là. Comment la vie heureuse serait-elle là où il n’y a pas de vie ? 

Saint Augustin (354-430), Confessions, IV, 12

MÉDITATION

Tout l’itinéraire intérieur de saint Augustin est dans la prise de conscience de ce que saint Jean nous dit au début de son évangile : « Toute chose subsiste dans le Verbe de Dieu. » Le réel des choses est dans cette Parole qui les fait être. Le péché nous fait habiter le monde des apparences, la « région de la dissemblance de Dieu », nous dirait encore saint Augustin. Toute conversion est retour au réel et à la raison, en même temps qu’à la Parole de Dieu.
Aimer les choses pour elles-mêmes, les isoler de cette Parole qui les fait être, c’est préférer l’image à la réalité. Non pas que les choses soient mauvaises et qu’il faille les oublier, mais ne subsistant qu’en Dieu, « que ce soit donc en lui que tu les aimes ».
Allons au créateur, et nous trouverons les créatures, dans toute leur densité divine ; mais s’arrêter aux créatures sans aller au créateur, c’est « chercher la vie heureuse dans la région de la mort ».

L´Auteur :

Augustin (Saint, 354-430)
Saint Augustin, fils d’un père païen et de la pieuse sainte Monique, le plus célèbre, le plus lu et le plus commenté des Pères de l’Église latine, est un berbère de l’actuelle Algérie. Converti par la prédication de saint Ambroise (en 386) après une jeunesse orageuse et la parfaite éducation d’un rhéteur de l’Empire romain finissant, il est évêque d’Hippone en 395. Son œuvre immense ouvre le Moyen Âge ; rédigée au moment où les invasions barbares marquent la fin de l’Antiquité, elle domine la théologie et la spiritualité occidentales.